Valeur verte : quel impact sur la valeur d’un bien immobilier ?

Depuis quelques années, le terme de valeur verte revient régulièrement lorsque l’on aborde la question de la valorisation d’un bien immobilier. Mais à quoi fait-il référence ? Que sous-tend-il exactement ? Et quel est l’impact de la valeur verte sur l’évaluation de la valeur vénale d’un bien immobilier ?

La valeur verte, c’est quoi ?

La charte de l’expertise en évaluation immobilière, dans sa 5ème édition de mars 2017, n’aborde pas cette notion de valeur verte. Il se murmure cependant qu’elle devrait être abordée de manière quasi-certaine dans la prochaine mouture de la Charte.

Différents organismes et institutions ont donné leur définition de la valeur verte :

  • L’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) définit la valeur verte de cette façon : « La valeur nette additionnelle d’un bien immobilier dégagée grâce à une meilleure performance environnementale. »
  • L’association « Développement de l’Information Notariale et de l’Analyse du Marché Immobilier et de la Conjoncture » (Dinamic) propose cette définition de la valeur verte : « La valeur verte correspond à l’augmentation de valeur engendrée par la meilleure performance énergétique et environnementale d’un bien immobilier par rapport à un autre bien immobilier toutes les autres caractéristiques étant égales par ailleurs ».

Ces deux définitions établissent donc un lien direct entre valeur verte et performance énergétique d’un bien.

Cela peut s’expliquer par la facilité de pouvoir quantifier objectivement l’économie d’énergie et la traduire éventuellement en valeur ajoutée.

Par ailleurs, Monsieur Christian PINCI, expert en évaluation immobilière, dans son livre intitulé « Pratique de l’expertise en évaluation immobilière et expertise judiciaire » nous livre une définition de la valeur verte, reprise pour partie sur celle donnée par DINAMIC, à savoir :

« La valeur verte se définit comme la variation de la valeur d’un bien immobilier imputable à sa performance environnementale, que celle-ci soit liée à sa performance énergétique à l’accès aux transports en commun ou encore aux matériaux de construction par rapport à un autre bien immobilier toutes les autres caractéristiques étant égales par ailleurs ».

Christian Pinci, « Pratique de l’expertise en évaluation immobilière et expertise judiciaire » (2022)

Cette définition va au-delà de la simple performance énergétique du bien, et prend ainsi en compte des critères liés à l’accessibilité, l’emplacement, aux matériaux de constructions…

Pour ma part, c’est cette définition de la valeur verte que je retiendrai, car elle se veut plus globale et demeure à mon sens dans l’esprit des règlementations récentes (notamment la RE 2020 qui englobe désormais l’intégralité du cycle de vie d’un bâtiment.)

Valeur verte : quel impact sur la valeur de votre bien ?

La genèse de la valeur verte

La notion de valeur verte peut être considérée comme la résultante des défis environnementaux, sur lesquels les pouvoir publics sont désormais contraints d’agir. Historiquement, il est possible de situer l’origine de la « valeur verte » dans les Accord de KYOTO (1995-2005) puis au travers de la Loi Grenelle I et II.

Depuis, on retrouve des références à cette notion, de manière non exhaustive : dans la loi ALUR de 2014, la loi transition énergétique et croissance verte du 18 août 2015 et plus récemment dans la loi Climat et silence d’août 2021.

Ces différents textes mettent donc en exergue le fait que les bâtiments sont un des principaux pourvoyeurs de gaz à effet de serre, du fait de leur consommation d’énergie mais également dans la façon dont ils sont construits. Ce constat est également rappelé par la Commission Européenne, qui souligne que les bâtiments dans l’UE sont responsables de 40 % de notre consommation d’énergie et de 36% des émissions de gaz à effet de serre. La neutralité carbone du parc immobilier d’ici à 2050 au plus tard est ainsi inscrit désormais dans le droit de l’Union européenne (Le règlement (UE) 2021/1119 du Parlement européen et du Conseil).

Le bien immobilier doit désormais s’adapter de manière continuelle et être de plus en plus performant pour répondre aux attentes du développement durable. En ce sens, règlementairement parlant, différentes réglementations thermiques se sont succédées (RT 74, 82, 88, 2000, 2005, 2012), et, aujourd’hui, on arrive même à un changement de terminologie, puisque la dernière norme en la matière n’est autre que la RE 2020 (règlementation environnementale).

Dans ce contexte règlementaire, la valeur verte est devenue un véritable sujet d’actualité en lien avec les problématiques climatiques.

À ce titre, la loi du 22 août 2021, avec un objectif avoué d’éradiquer « les passoires thermiques », semblent consacrer cette notion.

Par ailleurs, en termes de règlementation, on constate une nette accélération ces dernières années : Dispositif éco-énergie tertiaire, Taxinomie européenne, DPE, Loi Climat & Résilience, RE2020, pour ne citer qu’eux, entrent progressivement en vigueur, et peuvent impacter l’émergence d’une valeur verte.

À l’aube d’une transition écologique du marché immobilier, la valeur verte pourrait enfin se concrétiser !

Pelouse - Quel Impact de la valeur verte sur les prix de l'immobilier ?

Quel impact de la valeur verte sur la valeur vénale d’un bien immobilier ?

Une influence évidente sur les passoires thermiques…

Selon le plan bâtiment durable : « La performance énergétique et environnementale des biens est de plus en plus prise en considération par le marché immobilier, aussi bien à l’étranger qu’en France, pour le secteur résidentiel comme pour le secteur tertiaire ».

La théorie de valeur verte semble établir que si un immeuble est vertueux sur le plan environnemental, il bénéficie d’une prime (que ce soit sur les loyers, le prix de vente, l’attractivité, l’augmentation de la liquidité de l’actif, etc.).

Cette théorie peut se vérifier avec les dispositions de la loi climat et résilience impactant concrètement la valeur vénale d’un bien en posant notamment pour les propriétaires bailleurs d’un logement classé F ou G l’interdiction d’augmenter le loyer en cours de bail. Dans les communes où l’encadrement des loyers existe (comme par exemple BORDEAUX, PARIS ou LYON), il demeure également désormais interdit d’appliquer un complément de loyer.

De même, la notion de performance énergétique devient un critère de décence du logement (article 3 bis du Décret n°2002-120 du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent pris pour l’application de l’article 187 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains). A ce titre les biens classés G puis F seront concernés par une interdiction de mise en location.

Enfin, le parlement européen dans un vote du 14 mars 2023 a validé la proposition de refonte de la directive du Parlement européen et du conseil, sur la performance énergétique des bâtiments en imposant notamment, désormais, aux propriétaires européens de réaliser une rénovation énergétique avant de pouvoir vendre leur bien. Si le texte fixe les grands objectifs, c’est à chaque État membre que reviendra l’obligation de définir les moyens pour y parvenir dans son plan national de rénovation.

Mais plus limitée sur les autres biens…

Cependant, hors passoires thermiques, des facteurs tels que la localisation d’un bien, le taux de vacance du secteur considéré ou le standing d’un bâtiment indépendamment de sa sobriété énergétique l’emportent encore largement.

La valeur vénale d’un bien demeure un concept protéiforme prenant en compte notamment des facteurs environnementaux, juridique, fiscaux, physiques…

Tout l’enjeu de la notion de valeur verte est donc de voir si la hiérarchisation de ces critères peut évoluer, afin que le caractère durable et vertueux d’un bâtiment puisse peser de façon plus significative sur les paramètres de valorisation d’un bien immobilier. Conséquence déjà observable : des refus de financements ont été observés par la FNAIM au début de l’été 2021.Les banques ne souhaitaient pas financer des logements qui seraient progressivement classés comme « indécents ». Certains envisagent même de corréler le taux d’usure à la performance énergétique du bien.

Enfin il est à noter que l’accès aux données concernant notamment la performance énergétique des bâtiments demeure relativement récente : l’ADEME a ainsi ouvert en open data sa gigantesque base de données en septembre 2020.

Cependant le retraitement demeure à ce jour toujours fastidieux et les différentes DPE (pour ne citer qu’eux) coexistants (avant et après juillet 2021) et donc les méthodes de calculs et les classements sont difficilement comparables, ne facilitent pas la comparaison de ces données.

En conclusion, au vu des règlementations de plus en plus contraignantes, de l’objectif de neutralité carbone poursuivi par l’Union Européenne, et dans un contexte de crise énergétique ; l’impact de la valeur verte sera de plus en plus significatif dans la valeur vénale d’un bien.

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Nicolas Delage

Juriste de formation, Nicolas Delage est expert immobilier agrée par la Chambre des Experts Immobiliers de France (CEIF). Il fonde le Cabinet Delage Expertise en 2021, et se spécialise dans l'évaluation immobilière des biens résidentiels et d'exception, sur Bordeaux, en Gironde et plus largement en Nouvelle-Aquitaine.

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